La première ordonnance encadrant la possibilité de déroger à la réglementation en vigueur dans neuf domaines a été publiée au JO du 31 octobre.
Le droit à expérimenter dans la construction dispose désormais d’un cadre fixe. La première ordonnance, sur les deux prévues par l’article 49 de la loi Essoc – promulguée cet été – vient d’être publiée au journal officiel.
Le texte, qui entrera en vigueur « au plus tard le 1er février 2019 », définit « les modalités selon lesquelles les maîtres d’ouvrage des opérations de construction de bâtiments peuvent être autorisés à déroger à certaines règles de construction », et cela afin de recourir à des solutions à « caractère innovant, d’un point de vue technique ou architectural ». Il précise également les « conditions dans lesquelles l’atteinte de ces résultats est contrôlée ».
Neuf domaines concernés
Premier point, ce droit à expérimenter n’est pas cantonné aux projets de construction. L’article 2 de l’ordonnance fait également référence aux « travaux qui, par leur nature et leur ampleur, sont équivalents à une telle opération » de construction neuve.
L’article 3 liste les neuf domaines concernés par cette dérogation :
- « La sécurité et la protection contre l’incendie, pour les bâtiments d’habitation et les établissements recevant des travailleurs, en ce qui concerne la résistance au feu et le désenfumage,
- L’aération,
- L’accessibilité du cadre bâti,
- La performance énergétique et environnementale et les caractéristiques énergétiques et environnementales,
- Les caractéristiques acoustiques,
- La construction à proximité de forêts,
- La protection contre les insectes xylophages,
- La prévention du risque sismique ou cyclonique,
- Les matériaux et leur réemploi ».
Jusqu’à la publication de ce texte, seuls certains maîtres d’ouvrages étaient autorisés à déroger à la réglementation en vigueur, pour la réalisation de certains types de bâtiments seulement (équipements publics et logements sociaux), et dans deux domaines uniquement : la protection contre les risques d’incendie et l’accessibilité.
Attestation
Ce permis d’expérimenter élargi est adossé à un double système de contrôle en amont puis en aval de l’opération. Lors du dépôt de la demande de permis de construire ou d’aménager, le maître d’ouvrage souhaitant déroger à la réglementation dans l’un des neuf domaines listés dans l’ordonnance devra ainsi joindre une attestation, rédigée par un contrôleur technique ou l’un des organismes désignés dans un futur décret.
Ce document – conservé dix ans après la réception des travaux par le maître d’ouvrage – détaillera le caractère innovant de la solution mise en oeuvre ainsi que les moyens mis en oeuvre pour atteindre l’équivalence attendue, qui doivent encore être fixés par décret également. L’attestation précisera en outre « les conditions dans lesquelles la mise en œuvre de ces moyens est contrôlée au cours de l’exécution des travaux, en tenant compte de la nature de la dérogation, ainsi que les conditions d’exploitation et de maintenance du bâtiment ».
Indépendance du contrôleur
C’est également un contrôleur technique qui sera chargé de s’assurer de « la bonne mise en œuvre des moyens utilisés par le maître de l’ouvrage » au cours de l’exécution des travaux, puis à leur achèvement. Indépendant, ce professionnel ne devra entretenir avec le maître d’ouvrage ou les constructeurs de l’opération « aucun lien de nature à porter atteinte à son indépendance ». Le même professionnel sera également en charge de la transmission des données techniques de l’opération à « l’autorité administrative ou à un organisme placé sous son contrôle », là encore désigné par décret.
Seconde ordonnance attendue
Le cadre fixé par cette première ordonnance évoluera quoi qu’il en soit d’ici début 2020. En effet, l’article 49 de la loi Essoc précise qu’un second texte viendra remplacer les dispositions introduites par le texte publié ce 31 octobre au JO.
Cette seconde ordonnance « conduira à une réécriture du livre Ier du Code de la construction et de l’habitation ». Avec l’objectif de proposer aux maîtres d’ouvrage « la possibilité de plein droit de satisfaire à leurs obligations en matière de construction en apportant la preuve qu’ils parviennent, par les moyens qu’ils entendent mettre en œuvre, à des résultats équivalents à ceux découlant de l’application des normes de référence », peut-on lire dans le rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2018-937 du 30 octobre 2018.
Elle doit être prise « dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la loi » Essoc, intervenue le 10 août 2018.