Un bâtiment smart et à coût maîtrisé, voilà comment qualifier Ampère e+. La réhabilitation se devait être avant-gardiste mais surtout devenir « la vitrine de savoir-faire » de Sogeprom, promoteur immobilier. Avec, pour objectif final, de le dupliquer à la Défense et ailleurs.
Contexte. Acquis en 2013 par Sogeprom, promoteur immobilier filiale de Société Générale, ce bâtiment construit en 1985, a fait l’objet d’une grande réflexion.
En 2011, lorsque Christophe Dumas, directeur technique chez Sogeprom, arrive dans la société, la technologie n’en est qu’à ses prémices : « C’était il y a très longtemps… Il faut se rendre compte que l’Iphone n’avait que trois ans et nous savions que le monde de l’immobilier était en plein bouleversement malgré la crise et qu’il fallait entreprendre une vraie démarche novatrice ».
Sogeprom a alors cherché à se différencier en allant chercher des idées nouvelles auprès d’architectes, d’industriels, de bureaux d’études. « Tous n’ont pas répondu à nos attentes mais certains avaient vraiment l’envie de nous accompagner dans cette voie », assure le directeur technique.
En 2016, Ampère e+ a été livré à Primonial. Après deux années de travaux, le bâtiment est séparé en deux entités, la multi-locations et le siège social de Sogeprom, à environ 25% . « Nous n’avons pas touché à la surface, 15 000 m2 sur dix étages pouvant accueillir près de 1000 personnes », commente Christophe Dumas.
Des ascenseurs sur batteries de seconde main
Le premier à avoir répondu favorablement aux besoins d’innovations de Sogeprom est la société Otis avec des ascenseurs sur batterie dit système de « Battery for building ».
« Les ascenseurs fonctionnent normalement mais nous récupérons l’énergie fatale lors des phases de freinage et de descente. Cette production de chaleur est ensuite transformée en électricité, au même titre que les panneaux photovoltaïques, et ensuite stockée sur des batteries électriques de seconde vie issues de véhicules électriques Renault. Cela représente une réduction d’environ 8% de la consommation globale », détaille le directeur technique.
En effet, lorsque les batteries de véhicules électriques perdent 20% de leur capacité, le constructeur automobile les retire et les remplace dans les véhicules par des neuves. Sogeprom les récupère alors pour stocker l’énergie produite par les ascenseurs. « Cette location d’énergie est un business model. Tout est géré depuis un local par une société qui s’occupe de son entretien et de la maintenance. » Ce pilotage par ordinateur est une « première mondiale » et s’intègre dans le programme européen de recherche ELSA.
En cas de pics de consommation dans le quartier, Ampère e+ peut donc s’effacer partiellement du réseau de distribution.
Le confort des usagers
Ampère e+ a la volonté de « remettre l’humain au cœur du système ». Et cela passe par la mise en place d’une GTB « Work place efficiency » proposée par Schneider. « Au fur et à mesure de nos recherches, nous nous sommes rendus compte que la technique et la technologie ne sont pas des fins en soi. Le confort doit être une priorité ainsi que l’amélioration des émissions de carbone. Ici, elle a été diminuée de 59% par rapport aux recommandations 2016 de l’Ademe, soit 662kgeqCO2/m2. », indique Christophe Dumas.
Alors, chaque occupant peut commander les éclairages, les stores, la température (à +/-2°C) depuis son smartphone. Cette application mobile sert aussi de badge pour entrer dans le bâtiment, utiliser la machine à café, etc. Des services supplémentaires vont être proposés pour la réservation de salles par exemple ou encore des véhicules en auto-partage.
Pour assurer un véritable confort aux usagers, la qualité de l’air intérieur n’a pas été négligée : « C’est un gros axe pour nous. Nous avons démonté la façade pour la remplacer par une enveloppe vitrée en triple-vitrage et mis en place de la sur-ventilation. Nous avons aussi libéré des micro-organismes sur le mobilier et les parois, qui absorbent les molécules polluantes, allergéniques et malodorantes . Ampère e+ est le deuxième bâtiment, après celui de la commission européenne » à en être équipé.
Le LiFi, une première mondiale
« A chaque fois que l’on met en place une innovation dans un bâtiment, on se demande si c’est vraiment utile. Ici, nous pensons que le LiFI est un système qui va se généraliser », se positionne Christophe Dumas.
Cette technologie, développée par la société Lucibel, donne accès à internet par la lumière dans un rayon de deux mètres de diamètre. Sous ce cône de lumière bidirectionnelle à haut débit, les informations sont sécurisées, plus rapides, 1000 fois plus vite que le wifi classique, et présentent un intérêt sanitaire lié aux ondes lumineuses. Le LiFi utilise la lumière LED modulée pour transmettre de l’information (vidéo, son, géolocalisation) jusqu’à un récepteur dédié qui la décode sur un ordinateur, tablette ou smartphone.
Le système est déployé dans les salles de réunion du bâtiment. Ampère e+ est le premier bâtiment au monde à en être équipé de manière opérationnelle.
Des distinctions
Cette approche « avant-gardiste » leur a permis d’obtenir le label BBC Effinergie Rénovation grâce à une diminution de 43% du coefficient d’énergie primaire par rapport à la réglementation existante.
Mais, Sogeprom a reçu d’autres distinctions pour cette réhabilitation, à savoir le label NF HQE Bâtiment Tertiaire (niveau Excellent avec 11 étoiles), le Breeam (niveau Very Good), le C2C Inspired Building pour le volet économie circulaire, mais également pour le confort et le bien-être avec le label Well Core & Shell (niveau Platinium) pour l’immeuble dans sa globalité et le label Well Interiors (niveau Gold) pour les locaux loués par Sogeprom.
Dans le cadre de la dernière COP23 à Bonn, Ampère e+ a été désigné au niveau international comme le Smart Building de l’année 2017 aux Green Solutions Awards. A l’occasion du dernier Simi, le bâtiment a reçu le trophée « quartier d’affaires à vivre » dans la catégorie réhabilitation.
« Une véritable reconnaissance » pour le directeur technique.
Un quartier en mutation
Pour Sogeprom, « la reconquête du territoire » est un enjeu majeur. Le quartier de la Défense (92) a été conçu dans les années 80 et des bureaux, servant de déversoirs aux tours et aux sièges sociaux, ont été construits un peu plus en périphérie. Après la rénovation du bâtiment Ampère e+, le promoteur immobilier va s’attaquer à « son petit frère » de 9 000 m2. Il abritait les locaux de Total et n’était exploité qu’à 35%.
« Ce quartier est très intéressant car il est accessible directement en voiture, les loyers sont moins chers et les charges également» . Il mise alors sur ces réhabilitations, une cinquantaine seraient susceptibles d’être entreprises et soumises au même modèle qu’Ampère e+. « Nous avons conçu ce bâtiment avec les innovations d’il y a trois ans. Nous adapterons cette technologie selon les particularités des bâtiments et nous continueront à en trouver d’autres. Nous croyons à l’internet des objets, au tout IP pour les outils techniques ou encore au full Lifi », conclut Christophe Dumas.