Quelles conséquences aura l’arrivée du tout nouveau « permis de faire » en matière de sécurité incendie ? Les explications de Vincent Wermeister, directeur BatiSafe Paris, un bureau d’études spécialisé dans la mise aux normes et l’aménagement des bâtiments.
Le droit à expérimenter est effectif depuis le 1er février. Quelles conséquences cela implique-t-il en matière de sécurité incendie dans les nouveaux bâtiments ?
Cette démarche de simplification autorise les maîtres d’ouvrage à sortir du carcan réglementaire, en passant d’une obligation de moyens à une obligation de résultats, et cela dans neuf domaines : performance énergétique et environnementale, accessibilité, protection incendie, mais également aération, acoustique, risque sismique, réemploi des matériaux, protection contre les insectes xylophages et construction à proximité des forêts.
En matière de protection incendie, le nouveau droit à expérimenter porte sur les bâtiments d’habitation et les établissements recevant des travailleurs, et ne concerne que deux champs : la résistance au feu des matériaux et les systèmes de désenfumage.
Concrètement, jusqu’au 1er février 2019, seuls sept organismes en France étaient reconnus compétents pour réaliser des études d’ingénierie de la sécurité incendie (CNPP, CSTB, Efectis France, LNE, Lisi, Setec et WSP). Aujourd’hui, ces sept organismes deviennent des attestateurs, c’est-à-dire qu’ils sont là pour attester que la solution d’effet équivalent, proposée par le maître d’oeuvre, est conforme à la réglementation. Les bureaux d’études pourront donc désormais réaliser les études d’ingénierie de sécurité incendie, et porteront l’assurance, et non plus uniquement ces sept organismes.
Ce droit à expérimenter aura-t-il des implications particulières pour la maîtrise d’ouvrage en matière de sécurité incendie ?
Les maîtres d’ouvrage qui le souhaitent pourront désormais aller plus loin dans l’innovation, en termes de conception et de dispositions constructives.
Ce droit d’expérimenter devrait en effet permettre de faire évoluer les mentalités, d’ouvrir la discussion avec des interlocuteurs jusqu’à alors guidés par la réglementation. Cela devrait actionner une démarche intellectuelle nouvelle dans l’ensemble de la filière, la nouvelle procédure de contrôle pouvant se révéler moins coûteuse qu’auparavant, lorsqu’il fallait faire certifier sa solution par l’un des sept organismes compétents.
En parallèle, les bureaux d’études doivent – si ce n’est pas déjà fait – monter en compétences afin d’éviter les contre-performances, qui seraient fatales pour l’ensemble de la filière. Les sept organismes compétents s’inquiétaient d’ailleurs de la mise en place de cette procédure allégée. Ils devraient d’ailleurs se montrer particulièrement attentifs dans leur mission d’attestateurs finaux.
De nouvelles solutions pourraient donc être lancées sur le marché…
En premier lieu, cela va avoir des conséquences sur les modélisations que le bureau d’études devra fournir à l’organisme attestateur, afin de garantir la solution d’effet équivalent. En ce sens, ce droit à expérimenter va également accélérer l’arrivée de la maquette numérique dans nos métiers, puisqu’il s’agira de réaliser nos simulations en amont du projet, avec nos propres outils de modélisation.
Il sera donc tout à fait possible de recourir à des matériaux différents ou expérimentaux, en attendant de probables évolutions apportées par les fabricants.
La dimension financière devrait jouer un rôle déterminant dans le dynamisme de la filière : faire valider une technique non courante était une démarche coûteuse jusqu’au 1er février 2019.