Sols pollués, dépôts sauvages, gravats à l’air libre après un sinistre… Comment éviter la dispersion des éventuelles fibres d’amiante dans ces espaces extérieurs ? L’usage de liants -sous forme de polymères- commence à se répandre. Retour d’expérience avec Aléa Contrôles, sur un chantier des Pyrénées-Orientales.
Aléa Contrôles est intervenu sur un chantier constitué de terres polluées. Guillaume Fabre, responsable du pôle conseil, se rappelle : « Il s’agissait à l’origine d’un terrain vague, utilisé comme décharge sauvage. Les déchets ont été recouverts de terre par la suite, et le temps passant, tout le monde les a oubliés. Mais des années plus tard, alors que certains sont venus creuser dedans pour réhabiliter le terrain, ils ont mis au jour des gravats qui se sont révélés amiantés, ainsi que de la terre contaminée. L’entreprise a alors décidé de protéger la zone en urgence, pour éviter que le vent ne lève les poussières, avec une solution qui résiste aux aléas.
« Encapsuler » les matériaux amiantés
Le produit projeté est un polymère, éco-responsable, puisqu’il ne contient pas de composés organiques volatils (COV). « Un liant est dilué dans l’eau, pour avoir une solution finale plus ou moins concentrée selon les besoins du client. La phase solide contenue dans le liant va durcir le matériau sur quelques millimètres d’épaisseur en surface, après évaporation de l’eau. Il faut que le matériau de base soit un minimum poreux toutefois pour accrocher », explique Alexandre Lippold, responsable commercial pour la société INMS. Dès quarante-cinq minutes, une couche est déjà formée, il faudra ensuite attendre huit heures sans précipitation pour que le liant, resté en surface, crée une carapace « étanche », dans le sens où elle ne laisse pas passer les fibres d’amiante. « La couche solide ainsi constituée bloque tout envol des particules et fibres d’amiante. Le chantier n’est plus exposé aux quatre vents, à la pluie et la grêle… et les riverains ne sont ainsi pas exposés aux fibres, le produit participe donc à la sécurité du chantier », souligne Guillaume Fabre.
Zoom : Le maître d’ouvrage, responsable de ses déchets
La problématique des déchets n’est pas anodine pour le maître d’ouvrage, qui en reste propriétaire jusqu’à leur élimination. Inertage ou enfouissement, tout est question de coûts.
Le premier, plus cher, présente l’avantage d’éliminer définitivement les déchets, et ainsi de désengager la responsabilité du maître d’ouvrage. Le second est privilégié, mais, attention, si le centre d’enfouissement est placé en liquidation par exemple, on recherchera le producteur des déchets car sa responsabilité est toujours engagée. Une situation délicate à gérer…
Zéro fibre comptée
En pratique, le produit est projeté sur les gravats par temps sec, jusqu’à 30 mètres de hauteur. La brume se dépose ainsi sur le sol, et l’application est rapide : « En quelques heures, nous avons pu pulvériser 20 000 m3 de terre », indique Guillaume Fabre. Puisque le produit est « sans danger » pour l’environnement et son utilisateur, « il n’est pas nécessaire de porter d’EPI spécifique ou de masque pour l’appliquer si les conditions d’installation et d’utilisation sont réunies », ajoute Alexandre Lippold. La durée de vie du produit peut être modulée, d’un mois et demi jusqu’à un an, selon les besoins du client, en ajustant la concentration. À Perpignan, le polymère sécurisera la zone durant un an, « le temps de trouver une solution, de redéfinir le cahier des charges, de faire valider les nouvelles démarches… », souligne Guillaume Fabre.
Suite à l’application du polymère, des mesures sur le chantier de Perpignan ont été réalisées pour s’assurer de l’efficacité du produit. Résultat, 0 fibre comptée. Par la suite, le produit n’entrave par le travail des collaborateurs sur le chantier. Autre avantage, la couche de polymère est un produit neutre, « qui ne nécessite pas de traitement particulier, et se dégrade d’elle-même. Cela ne rajoute donc pas de déchet sur le chantier », souligne Alexandre Lippold. Le produit est évacué avec les gravats, soit pour être revalorisé, soit avec les déchets amiantés en centre d’enfouissement.
Zoom : Une solution proposée par plusieurs fabricants
Preuve de l’intérêt pour le produit ? Plusieurs entreprises proposent désormais une version de ce liant. Du côté de Perpignan, c’est la société INMS (Vitrolles, Bouches-du-Rhône) qui a mis à disposition son produit ; à Marseille, le produit du fabricant Polyasim (Ternay, Rhône) a été répandu sur des gravats.
Différence entre les deux produits ? Celui de Polyasim présente une teinte bleue, qui a notamment interpellé les riverains selon la presse locale. « Avec le liant de Polyasim, on remarque tout de suite si tous les matériaux sont bien recouverts, ou s’ils sont déplacés par la suite. Avec le produit incolore d’INMS, nous devons juste attendre que la croûte se forme pour s’en rendre compte », souligne Guillaume Fabre.
Polyasim a récemment présenté son produit lors du Salon des professionnels de l’amiante dans le cadre des Trophées de l’innovation, INMS prévoyait (octobre 2019) de déposer un dossier auprès de la Commission d’évaluation des innovations techniques dans le domaine de la détection et du traitement de l’amiante dans le bâtiment (Cevalia), après validation des analyses du produit en laboratoire.
1 réflexion sur « Retour d’expérience. Des polymères écologiques pour recouvrir les déchets d’amiante »
Comment obtenir des echantillons de ces produits?