Comment gérer la problématique amiante lors d’une rénovation de façade amiantée ? Le fabricant d’ITE Myral a développé un système de cloche d’aspiration adaptée à ses panneaux pour percer les façades sans libérer de fibres. Julien Bagnard, responsable études et développement au sein du bureau d’études Myral, détaille le procédé, récemment mis en œuvre pour la rénovation de la résidence Jean-Jacques Rousseau au Mans.
Pouvez-vous revenir sur la genèse de ce dispositif ?
Nous travaillons sur cette cloche depuis 2014, puisque pour le bureau d’études Myral, il était nécessaire de maîtriser chaque problématique se présentant à nous : thermique, hygrothermique, risques incendie et sismique, mais aussi risque amiante, que nous rencontrions de plus en plus souvent sur les chantiers.
Notre ITE est un système de vêture vêtage composé de panneaux préfabriqués qui ne nécessitent ni lame d’air ni ossature et qui se révèle moins contraignant dans sa mise en œuvre. Ce système vient se clipser directement sur la façade, il faut donc en effet prévoir de la percer en respectant les précautions. C’est une étape contraignante qui peut allonger les délais du chantier s’il faut passer par une entreprise spécifique pour réaliser les trous en amont sans libérer de poussières amiantées. Notre objectif était donc de simplifier la façon de procéder, et pour cela nous nous sommes rapprochés d’une organisme de formation, C2P formation (Dijon) pour nous accompagner dans notre recherche de solution technique.
Concrètement, comment fonctionne l’outil ?
Nous avons fait fabriquer notre propre cloche d’aspiration, en nous rapprochant d’un bureau de conception 3D. Il existait déjà sur le marché des systèmes d’aspiration à la source avec cloche, mais aucun ne s’adaptait à nos panneaux, car l’espace entre le trou de fixation de la rive du panneau et le rebord de celui nécessitait un modèle de cloche avec un trou déporté de l’axe. Concrètement, une griffe en acier se clipse derrière le panneau, permettant de tenir la cloche pour faciliter la mise en œuvre. L’opérateur passe ensuite l’outil à travers le trou de la cloche, et la poussière issue du percement est directement captée à l’intérieur de la cloche et dirigée vers un aspirateur avec filtre à haute efficacité.
C’est la société Isore Bâtiment (Laval), dont les collaborateurs sont formés en sous-section 4, qui a posé les panneaux Myral. Elle a utilisé la cloche pour la première fois sur ce chantier. « Nous rencontrons l’amiante dans près de 80% de nos chantiers de réhabilitation. Habituellement, nous utilisons des systèmes d’aspiration à la source pour nos percements, mais la cloche est adaptée à la pose des panneaux Myral, et le procédé est très efficace », souligne Franck Hardy, responsable du développement chez Isore Bâtiment.
Vous avez ensuite testé vous-même la cloche sur chantier…
En effet, en 2016, nous avons revêtu la casquette de l’entreprise de pose sur l’un de nos projets, en accord avec le maître d’ouvrage. Nous avons réalisé des chantiers tests sur une partie de la façade, après avoir créé notre mode opératoire, transmis à l’inspection du travail. Nous avons louer une UMD, prévu les EPI adaptés au niveau d’empoussièrement attendu pour cette opération, et intégré les mesures d’empoussièrement. Durant le chantier, ces mesures ont révélé 0 fibre comptée. L’outil est désormais breveté. Aujourd’hui, plusieurs chantiers se sont déroulés avec la cloche de percement. Nous avons également créé un guide de pose amiante, et la solution complète (cloche et mode opératoire) peut être transmise aux entreprises de pose intéressées.
Quels sont les avantages de la cloche de percement ?
Elle permet de réduire les contraintes du chantier, puisqu’elle supprime le risque amiante. Les opérateurs ne sont ainsi plus exposés aux fibres. C’est aussi un gain de temps, puisqu’on estime qu’un chantier sur une façade amiantée réalisé sans la cloche nécessitera 10 à 15% de temps supplémentaire. Quelques cloches suffisent pour une façade de 1000 m2, et elles peuvent être utilisées plusieurs fois sur le chantier, voire d’un chantier à l’autre si peu de percements ont été effectués. Autrement, les cloches partent avec les déchets amiante.
Zoom : L’emploi du BIM pour la pose des panneaux
Sur ce chantier, l’entreprise de pose Isore Bâtiment a déployé un processus BIM. » Cela fait déjà sept ans que nous avons développé cette compétence au sein de notre société », explique Franck Hardy, responsable du développement chez Isore Bâtiment. À l’époque, la société pressent l’enjeu que représente le BIM, un outil qui permet aujourd’hui à ses équipes d’être plus performantes. « Parfois nous avons peu, voire pas de plans des bâtiments. La photogrammétrie par drone nous permet de modéliser l’existant, prévoir la pose de l’ITE, et même éventuellement de faire des études de prix », indique Franck Hardy.
La maquette permet également à Isore Bâtiment de disposer de nombreuses données : surfaces sur lesquelles intervenir, nombre de plaques, optimisation des découpes… permettant par la suite d’établir des plannings précis pour la pose. « Cela nous aide grandement dans l’organisation du chantier, et pour prévoir au plus juste les commandes. À la fin du chantier, la maquette renseignée est transmise au maître d’ouvrage, qui peut en faire usage pour le suivi de son bâtiment, mettre en place des alertes pour le nettoyage de son parement par exemple. »